Le paradigme �nerg�tique a longtemps eu l'avantage de sa disponibilit� : au fur et � mesure qu'�mergeait le ph�nom�ne-entreprise, sous la forme organisationnelle o� nous le connaissons aujourd'hui, celle des Arsenaux du Roy d�s le XVII�me si�cle. Par exemple, il �tait l�, disponible, justifi� tant par des consid�rations �pist�mologiques que par des consid�rations pragmatiques : l'Entreprise s'organisait pr�cis�ment pour g�rer - et peut-�tre pour optimiser - la production, la transformation et la r�gulation d'une ressource rare, l'Energie. Ce concept ambigu et multiforme, avait, et a toujours, l'avantage de f�d�rer de fa�on intelligible et uniforme tous les types de ressources que les entreprises sont susceptibles de valoriser et par rapport auxquelles elles s'identifient.
Cette vocation essentiellement �nerg�tique (au sens large) de l'Entreprise commence � s'av�rer par trop r�ductrice de sa complexit� telle que la per�oivent ses acteurs (Le Moigne, 1986b). On comprend que les limitations de ce paradigme deviennent malais�ment supportables. On a pu croire que le paradigme Cybern�tique, diff�renciant au sein du paradigme Energ�tique les processus informationnels de r�gulation des processus proprement �nerg�tiques de production-transformation, permettrait de reculer suffisamment ces limites du mod�lisable. On a montr� la fragilit� �pist�mologique de cette extension, diagnostic que nombre de consid�rations empiriques confirment depuis que les entreprises informatisent leurs activit�s et leurs organisations (Le Moigne, 1987). C'est pr�cis�ment cette discussion qui a conduit � d�velopper et � expliciter le paradigme Inforg�tique � fin de mod�lisation (donc dans l'univers ?) des ph�nom�nes per�us � la fois identifiables et complexes : Paradigme construit sur l'intelligence de la correspondance �Information Organisation�.
On doit donc pouvoir proposer une nouvelle probl�matique de mod�lisation des entreprises (et plus g�n�ralement des organisations sociales entendues comme des construits sociaux organis�s et organisants), une �mod�lisation Inforg�tique��. C'est � cet exercice que l'on se propose de s'attacher�de fa�on sommaire dans la derni�re partie de cette �tude, sous la forme de 10 propositions dont la conjonction conduit � une probl�matique de la repr�sentation des organisations sociales que l'on tient pour argument�e �pist�mologiquement et pertinente en terme d'informatisation.
L'Entreprise-Organisation se per�oit comme et par un complexe d'actions organis�es et organisantes, actions visant � la fois � produire, maintenir et relier et � se produire, se maintenir et se relier.
Cette repr�sentation id�altype de l'auto-repr�sentation de l'entreprise par elle-m�me implique une conceptualisation forte de la notion d'organisation que l'on tient ici pour acquise1. Elle conduit � d�laisser le sch�ma habituel de la �mod�lisation ensembliste-identitaire� (Castoriadis, 1975) : elle n'est pas per�ue comme un Objet mais comme une Action, un �complexe d'actions� (ou un �tissus d?interactions�). Elle n'est donc pas analysable (d�composable) en un ensemble d'�l�ments-objets-stables empiriquement identifiables. Elle conduit � �tablir une carte stable (des r�seaux ouverts de processeurs activables) d'un territoire que l'on pr�sume en �quilibrations synchroniques et diachroniques permanentes.
L'hypoth�se sous jacente du paradigme Inforg�tique consiste � tenir une telle repr�sentation fonctionnelle comme pertinente pour le support de raisonnements-simulations � fin d'interventions.
L'Entreprise-Organisation s'identifie par son processus endo-exog�ne d'autonomisation t�l�ologique.
Autrement dit, par sa capacit� � �laborer de fa�on endog�ne les projets en r�f�rence auxquels elle d�terminera ses comportements (d�cisions), comportements qui la diff�rencient du substrat exog�ne dont elle se per�oit solidaire. Cette repr�sentation express�ment t�l�ologique de l'Entreprise ?Organisation conduit � r�cuser les r�ductions habituelles au mod�le m�canique (d�terministe ou stochastique) d'une machinerie s�quentielle ou cybern�tique de causes et d'effets (lin�aires ou circulaires) calculables. En agissant, l'Entreprise est per�ue (ou se per�oit) comme r�-engendrant en permanence ses propres finalit�s, par lesquelles elle s'autonomise en �laborant elle-m�me (d�cisions) ses comportements propres.
L'Entreprise s'entend par rapport � ses projets et � sa capacit� t�l�ologique de r��laboration permanente de projets et non par rapport � une structure quasi m�canique de relations causes-effets telle que la conceptualisait le paradigme �nerg�tique.
L?entreprise-organisation se d�crit elle-m�me, en termes auto-�co-r�ferentiels : elle se repr�sente par conjonction permanente de mod�les distinguables mais ins�parables.
Les mod�les qu'un tiers pourrait �tablir d'une entreprise donn�e (par exemple les mod�les qu'une entreprise se donne de ses concurrents, de ses fournisseurs ou de ses clients) sont n�cessairement des mod�les de substitution : ceux que l'on �tablit en se mettant � la place de l'autre : il n'existe donc pas un mod�le Id�altype d'une entreprise donn�e, mais un m�ta-mod�le qui rappelle ce processus d'auto-�co-mod�lisation. Le mod�le auto-�co r�f�rentiel que l'entreprise se construit d'elle-m�me pour elle-m�me est conjonction de deux classes de mod�les, distinguables parce qu'in�galement formalisables (dans l'�tat actuel des connaissances), distinguables mais n�cessairement ins�parables, que �le comportement soit le moteur de l'�volution��, dixit J. Piaget (1976), ou r�ciproquement, dixit les th�ories du d�terminisme g�n�tique, que �l?�volution soit le moteur du comportement���:
les mod�les synchroniques-op�rationnels (ou encore les mod�les du fonctionnement organis�)
les mod�les diachroniques-strat�giques (ou encore les mod�les de la finalisation organisante) aujourd'hui souvent pr�sent�s sous le label du mod�le du �projet d'organisation��.
L'entreprise-organisation se per�oit en permanente �quilibration - ou adaptation t�l�ologique - au sein de ses environnements (substrats, contextes, milieux, champs, processus, ...). Cette �quilibration se d�veloppe par un double processus endog�ne d'accommodation (ou de canalisation communicationnelle) et d'assimilation (ou de codage informationnel).
Le c�l�bre concept Piag�tien (1975) �d'Equilibration des structures cognitives� �propose un sch�ma suffisamment g�n�ral pour exprimer sans la mutiler la probl�matique centrale de toute organisation, qu'elle soit vivante, sociale, naturelle, artificielle : �Elle passe son temps � s'�quilibrer� et ce, par exemple, en �r�vant de se reproduire� (F. Jacob) ou � �jouir de son m�tabolisme� (E. Morin).
Le tour un peu trop l�ger de la formule vise seulement � �veiller l'attention : derri�re l'abstraction des concepts, on retrouve express�ment le concept de l'invariance de ce processus d'�quilibration t�l�ologique propre � toute organisation : il est dual, concernant � la fois le contenu et le contenant, l'instrument et le r�sultat produit. N. Wiener le d�crit par le jeu �de la communication et de la conduite��, C. Shannon par celui �du canal et du code��, les biologistes par celui de �l'engramme et du programme��, les informaticiens par celui de �la structure des donn�es et du programme de traitement��, les psychologues de la cognition, enfin, dans la formulation de J. Piaget, par le jeu de l'accommodation (ou de la r�gulation endog�ne suscit�e par la forme-organis�e de l'organisation) et de l'assimilation (ou de la production-transformation-traitement des codes exprimant les informations par lesquels l'organisation engramme ou se repr�sente ses activit�s t�l�ologiques). Per�ue en �quilibration permanente, l'entreprise se repr�sente donc par le jeu de ses propres processus de communication (le choix des �canaux��) et de ses processus de production d'information codables et d�codables (le choix des �codes internes�).
L'Entreprise organisation se per�oit comme et par un syst�me de g�n�ration d'informations propres (ou g�n�riques). Ces informations sont toujours produites sous la forme de syst�mes de symboles physiques, c'est � dire de signes qui, repr�sent�s par des formes physiques (des signaux) dans l?univers?, sont interpr�t�s dans l'univers ? comme �tant � la fois signe (op�rateur et op�rande), signifi� et signifiant.
Les mod�les �nerg�tiques de l'organisation en g�n�ral achoppent tous sur le probl�me de l'identification du concept d'information : on ne peut s'en passer et on ne parvient pas � le d�finir de fa�on satisfaisante. La c�l�bre tentative de L. Brillouin (1962) proposant de faire de l'unit� d'information (Neg-entropie) le quantum �l�mentaire absolu constitutif de l'�nergie n'a pas abouti.
Et il a fallu attendre la diff�renciation �pist�mologique de l'Univers ? (dans lequel l'information, forme physique �diff�rente� tangible, est reconnaissable) et de l'Univers ? (dans lequel cette forme �diff�rente� peut s'entendre op�ratrice, productrice d'elle-m�me et engendrant des �images mentales� diff�rentes) pour que le concept d'information soit appr�hendable de fa�on satisfaisante : l'information, cette action qui met en correspondance les �v�nements per�us du �Territoire� (l'Univers ? ) et les �v�nements con�us sur �la carte� (l'univers ?).
H.A. Simon et A. Newell (1975) ont formul� cette conceptualisation sous le nom de "l'Hypoth�se du Syst�me de Symbole Physique", de fa�on � d�gager l'invariant conceptuel de cette d�finition parall�le dans les deux univers du discours : le Symbole ; une information �tant, par d�finition, un syst�me (ou une liste) de symboles. En pr�cisant �symbole physique��, ils soulignent le fait que le concept est aussi d�fini dans l'Univers ? des ph�nom�nes tangibles (celui de ��la diff�rence per�ue sur le territoire�) et dans l'univers ? des repr�sentations o� le symbole se complexifie doublement (la diff�rence dans ��l?image mentale� pouvant susciter une diff�rence dans le comportement).
��L?information est une diff�rence qui engendre une diff�rence� r�sumait G. Bateson en 1970.
Autrement dit, le symbole (syst�me de symboles) s'entend � la fois op�rateur pragmatique (ce qui engendre ou ce qui forme) et op�rande s�mantique (ce qui est signifi� ou d�sign�). On n'a sans doute pas encore �puis� la complexit� famili�re de ce signe-signifi�-signifiant qu'avaient d�j� reconnu Ch. Morris ou W. Weaver percevant que la th�orie de la communication �tait aussi une th�orie de l'information et donc aussi une th�orie du signe (S�miologie) : Intelligible conjointement en trois niveaux non-disjoignables, l?information conjoint les trois fonctions distinguables de la Syntaxique (d�signation), de la S�mantique (interpr�tation), et de la Pragmatique (communic-action). C'est ce concept complexe qu'il importait de reconna�tre sans le mutiler pour rendre compte de cette hypoth�se � la fois fondamentale et triviale : L'Entreprise-Organisation se per�oit comme un syst�me de production d'information (ou de symboles). Et plus sp�cifiquement encore, si l'on prend en compte l'�nonc� de la proposition n� 4 relatif au processus de codage : l'Entreprise ne peut pas ne pas se percevoir comme et par un syst�me de production de symboles.
L?Entreprise-Organisation forme ou construit, intentionnellement, l'information qui la forme.
Application puis g�n�ralisation de la proposition pr�c�dente qui avait permis d'�tablir la d�finition Inforg�tique de l'information et du symbole, cette proposition n� 6, qui va s'av�rer centrale au paradigme Inforg�tique, peut s'entendre sur deux registres conjoints, �celui de l'information g�n�rique et celui de l'information circulante� pour reprendre une distinction importante formul�e par E. Morin �(1977)�:
Dans l'infini des repr�sentations possibles, l'organisation forme, de fa�on autonome - t�l�ologique des informations-codes (des syst�mes de symboles) par lesquelles elle s'assimile ses interactions intentionnelles avec ses environnements.
Cette formation de codes-symboles s'accompagne de la production de �canaux de communication� (autrement dit, de r�seaux organis�s susceptibles d'�tre organisants) qui assurent la circulation-communication au sein de l'organisation, de l'information g�n�rique puis circulante, information qui devient ainsi elle-m�me organisante.
On peut distinguer, on ne peut s�parer ces deux processus de g�n�ration-communication de l'information qui vont s'av�rer constitutifs de l'organisation. La m�taphore de l'?uf (information) et de la poule (organisation) semble insuffisante pour rendre compte du processus que l'on doit d�crire ici, dans la mesure o� l'on peut trop ais�ment concevoir de fa�on disjointe l'?uf et la poule. E. Morin utilise une m�taphore peut-�tre plus parlante, celle de la formation d'une cellule eucaryote (une cellule avec noyau) � partir d'une cellule photocaryote (une cellule avec cytoplasme mais sans noyau). Le cytoplasme se construit par le jeu des interactions physicochimiques que r�gle la membrane embryonnaire : ainsi commencent � s'accumuler les informations g�n�riques. En circulant (m�taphoriquement) au sein de la �cellule� elle-m�me encore embryonnaire, elles suscitent progressivement, par concentration et densification locale d'interactions mutuelles des informations circulantes, l'apparition du noyau, forme organis�e d�j� organisante, qui va affecter l'organisation de la cellule toute enti�re. Que l'on n'entende ici qu'une m�taphore plausible, susceptible de proposer une intelligence acceptable dans l'Univers ? de ce processus somme toute familier dans l'Univers ? tel que le d�crivent volontiers biologistes ou cybern�ticiens.
L'organisation s'entend d�s lors (dans l'univers ) par une forme (gestalt), elle-m�me reconnaissable par ailleurs dans l'univers ?, sous forme � la fois form�e et formante ; form�e, elle forme des informations g�n�riques ; formante, elle se forme elle-m�me par la circulation des informations qu'elle forme.
Cette hypoth�se constitutive du paradigme Inforg�tique, �L'information in-forme l'organisation qui la forme��2 va devenir l'argument-clef de la repr�sentation - par des informations - de l'activit� inform�e et informante - de l'entreprise-organisation : autrement dit, l'argument-clef de la conception et de la gestion du Syst�me d'Information de l'Organisation.
L'Entreprise-Organisation, autonome, t�l�ologique, active, inform�e et informante met en ouvre des processus d'�laboration d�lib�r�e de ses d�cisions d'op�ration et d'information.
Pour une large part, cette proposition pourrait �tre tenue pour un corollaire des propositions pr�c�dentes, puisqu'un syst�me finalis� et finalisant est n�cessairement capable non seulement de d�cider de ses comportements, mais aussi d'�laborer ses d�cisions (The Decision-Making Processes). Il est pourtant n�cessaire de l'expliciter sp�cifiquement pour mettre en valeur le fait que les processus de d�cisions de l'organisation ne concernent pas seulement la d�termination de ses op�rations, mais aussi de ses informations. Si une organisation ne peut pas ne pas (s') informer, elle doit pourtant d�cider (non sans arbitraire a priori) de cette information : si l'on pr�f�re, condamn�e � se d�placer, elle a le choix permanent de ses itin�raires, mais elle ne peut pas ne pas les d�cider (quitte � d�cider de ne pas d�cider ou de d�cider au hasard).
H.A. Simon a remarquablement mis en valeur la complexit� de ce n�cessaire processus d�cisionnel des organisations humaines. En particulier en soulignant le caract�re informationnel et t�l�ologique de ce processus : l?organisation a non seulement � d�cider de la solution d'un probl�me, mais elle a aussi, et peut-�tre surtout, � d�cider de la formulation des probl�mes � r�soudre. Les probl�mes ne se posent pas tout seuls et les d�cisions visant � r�soudre des probl�mes qui ne se posent pas sont habituellement perverses : elles conduisent � faire poser d'autres probl�mes que l'organisation aurait ignor�s si elle n'avait pas tenu � r�soudre un probl�me dont elle ne s'�tait pas assur�e qu'il ne la concernait peut-�tre pas, ou pas dans les termes retenus. Cette fonction d�cisionnelle doit en cons�quence affecter tr�s profond�ment la repr�sentation que l'organisation se donne d'elle-m�me � elle-m�me : elle ne s'organise peut-�tre pas d'abord pour assurer ses op�rations en optimisant ses comportements �nerg�tiques ? Elle s'organise pour susciter le plus possible d'intelligence adaptative au sein de ses propres d�cisions3.
L?Entreprise-Organisation se repr�sente par la conjonction de trois processus indissociables et distinguables d'Op�ration, d'Information et de D�cision.
Cette proposition synth�tique a �t� si fr�quemment consid�r�e et interpr�t�e depuis sa premi�re formulation en 19744 que l'on ne la reprend ici que pour m�moire... et parce qu'elle facilite grandement en pratique les exercices d'ing�nierie de l'organisation. Sa justification au sein du paradigme Inforg�tique m�rite pourtant d'�tre soulign�e, ainsi que la dialectique sous jacente que ce mod�le permet d'exprimer mais aussi parfois d'�luder : si l'organisation de l'entreprise s'interpr�te en r�f�rence au processus informationnel qu'elle forme et qui la forme, peut-on consid�rer en m�me temps que l'organisation d�cide d'elle-m�me de son comportement et de ses transformations ?
On rencontre ici un conflit conceptuel qui n'a peut-�tre pas encore �t� assez consid�r�, entre les th�ories de l'ordre social spontan� (l'organisation se forme sans projet dans le bruit informationnel qu?elle forme en (s?) informant) et celle de l'auto-organisation t�l�ologique (l'organisation, dans et par ses interactions avec ses contextes �voluant, d�cide des projets qui la forment). C'est pr�cis�ment en concentrant la r�flexion sur les dualit�s du processus informationnel (� la fois g�n�rique et circulant, � la fois produit par les op�rations et produit pour les d�cisions) que l'on d�veloppera cette intelligence de l'organisation bivalente, op�rant dans, sur et pour ses �environnements externes��, et d�cidant dans, sur et pour son organisation propre (son �environnement interne��, dira H.A. Simon(1981)).
L'Entreprise-Organisation est repr�sentable par un Syst�me de Traitement d'Information (STI) autrement dit par un syst�me de computation-communication-m�morisation de symboles.
La d�finition que l'on a propos�e du Paradigme Inforg�tique peut sans difficult� �tre reprise pour �tre pr�sent�e dans les termes de la d�finition du �Paradigme du Syst�me de Traitement de l'Information� formul�e par H.A. Simon (1986), cette derni�re mettant moins directement en �vidence le caract�re r�cursif des concepts d'Organisation et d'Information. On montre facilement que l'on passe ais�ment de l'un � l'autre, le paradigme Inforg�tique pouvant exprimer, par une mise en �criture sous la forme d'un STI les contributions � la Th�orie de l'Auto-Organisation5 de H Von Foerster, H. Quastler, H. Atlan et surtout ici d'E. Morin (qui parle ici plus volontiers de l?Auto-Eco-G�no-Organisation). On montrerait la m�me g�n�ralisation des th�ories �tablies pour et dans le paradigme �nerg�tique, volontiers interpr�t�es pour la mod�lisation des organisations, telle que la th�orie des bifurcations et des structures dissipatives de I. Prigogine ou la th�orie des catastrophes morphog�n�tiques de C.H. Waddington et R. Thom.
Un syst�me de symboles physiques, (ou un STI), mis en ?uvre par un exercice de mod�lisation d'un ph�nom�ne per�u complexe (dans l?univers ?), se d�crit par la conjonction de trois fonctions, fonctions r�cursives en ceci qu'elles portent sur des symboles que l'on a d�fini comme �tant des op�rateurs dans les deux univers ? et ?�:
une fonction de computation de symboles, autrement dit une Machine de Turing, assurant s�quentiellement lecture, production et �criture, agr�gation, effa�age, adressage et branchement de symboles selon des s�quences de r�gles quelconques (des heuristiques) descriptibles par des �syst�mes de production��6 (le calcul num�rique est donc un cas tr�s particulier de la computation symbolique).
une fonction de communication, ou plus correctement de transmission de symboles, lequel peut-�tre d�crit par un syst�me de computation dans l?univers ? o� la transmission se repr�sente par �un syst�me de Traitement du signal�, codant et d�codant (computation donc) des symboles physiques.
Ces deux fonctions de base de tout STI ont �t� d'autant plus ais�ment d�crites dans l'univers ? qu'elles rencontrent l'une et l'autre des limites de capacit� physique et donc �nerg�tique : la capacit� du Canal de Transmission du signal, Hmax, n'est pas a priori illimit�e m�me si C. Shannon (1949) a montr� que l'on pouvait en partie s'en affranchir en jouant sur le syst�me de codage et sur sa redondance (par computation donc). Et les limites de capacit� de computation d'un �computeur� dans ? et dans ?, qu'il soit naturel ou artificiel, sont famili�rement contraignantes, m�me pour les calculateurs prodiges : H.A. Simon, reprenant et interpr�tant les c�l�bres �tudes de G. Miller (1956) a souvent soulign� l'importance du �butoir des sept shunks� (ou unit� d'information m�morisable et computable) qui limite sans cesse l'activit� computationnelle de l'esprit humain et plus g�n�ralement d'un �Syst�me de Production de Symboles� fini.
La th�orisation, dans l?univers?, des syst�mes de traitement du signal a conduit � mettre en valeur la conjonction de ces deux limites de leur capacit� de computation et de transmission, sous la forme classique des deux principes de l'Energ�tique :
Le principe de conservation, qui exprimant la transmission en termes de computation dans une unit� de temps, dira que Cp + Ht < Ks ; autrement dit, pour un STI, "s" donn�, la somme des activit�s possibles de traitement de signaux (Computation, Cp, ET Transmission, Ht) est born�e sup�rieurement par une valeur K(s).
Le principe de d�gradation, qui exprime l'affaiblissement irr�versible au fil du temps, de ce �potentiel� de Traitement (computation et transmission) du signal (la d�gradation entropique que symbolise la notion de �bruit� propre au syst�me). Si on en d�signe l'intensit� par la notation ?, 0<?<1, on pourra exprimer cette double interpr�tation sous la forme : �Cp + Ht ? Ks (1 - ?s).
La formulation Inforg�tique de cette limitation d'ordre �nerg�tique va conduire � reconsid�rer la nature des caract�ristiques K (le potentiel maximum de traitement du STI) et ? (le bruit propre au STI) : K et ? n'y sont plus donn�s mais construits, construits par l'organisation du syst�me dans l'univers ? dans lequel on le repr�sente.
La reconnaissance de la fonction m�morisation d'un STI va rendre � la fois possible et praticable cette red�finition et l'exceptionnelle amplification de son potentiel symbolique. L'ing�nierie �nerg�tique de la m�morisation tournait n�cessairement court, r�duite par hypoth�se � des consid�rations sur le caract�re on�reux du magasinage de �jetons� (le symbole physique n'�tant dans l'Univers ? qu'une forme tangible, un jeton).
D�s lors que l'on peut repr�senter, dans sa complexit� potentielle, la fonction de m�morisation symbolique entendue comme un processus de m�ta-computation, on va pouvoir, dans l'Univers ? , exprimer en termes Inforg�tiques, son exceptionnel effet amplificateur de computation et de transmission d'un STI. L'organisation ne peut pas ne pas m�moriser d�s lors qu'elle ne peut pas ne pas computer et communiquer des symboles.
Le champ est d�sormais ouvert � l'ing�nierie de la mod�lisation Inforg�tique des organisations : la prise en compte des processus inforg�tiques de m�morisation transforme - parfois consid�rablement - la repr�sentation que les organisations sociales peuvent se construire de leurs comportements. L'organisation t�l�ologique de la fonction m�morisation devient le m�ta-mod�le, ou plut�t le mod�le-noyau, le pattern, de l'organisation sociale entendue dans sa complexit� inforg�tique. (On pr�tend ici que le paradigme �nerg�tique ne permet pas de rendre compte de ces processus de m�morisation organisationnelle que l'on tient pourtant pour donn�s par l'exp�rience sensible dans l?Univers?. C'est ce constat qui a progressivement conduit � conceptualiser le paradigme inforg�tique).
L'Entreprise-Organisation se comprend par un syst�me d'action intelligente et donc par sa capacit� � se finaliser, � comprendre et � concevoir.
Le concept de "Syst�me d'Action Intelligente" d�gag� en 1975 par H.A. Simon et A. Newell permet de rendre compte, au sein du paradigme Inforg�tique, des processus par lesquels une organisation �comprend� les probl�mes d'�quilibration t�l�ologique qu'elle identifie intentionnellement, puis quelle �con�oit� et met en ?uvre les comportements et les interventions par lesquelles elle se propose de �r�soudre� ces probl�mes.
La possibilit� de �repr�senter� par un syst�me de traitement de symboles, un syst�me d'action intelligente et donc une organisation per�ue comme capable d'action adaptative (ou intelligente), va constituer la th�se centrale de H.A. Simon et A. Newell, celle � partir de laquelle on pourra fonder sur des bases �pist�mologiques r�fl�chies l'Intelligence Artificielle et les Sciences de la Cognition. On peut d�finir une action intelligente comme l'action d'une organisation visant � �laborer et � mettre en ?uvre une solution (ou une �r�ponse�) adaptative intentionnelle (une adaptation ou plus g�n�ralement une �quilibration) � un probl�me auto identifi� t�l�ologiquement par l'organisation.
La repr�sentation de ce processus de formulation-r�solution de probl�me, tenu pour isomorphe d'un processus de d�cision d'action intelligente, par un STI conduit � diff�rencier trois phases embo�t�es de �Compr�hension� , de �Conception� et de �Finalisation� . (Le processus de finalisation s'entendant par sa fonction amplificatrice des fonctions de compr�hension et de conception, comme pr�c�demment la fonction de m�morisation s'interpr�tait en terme de catalyseur des fonctions de computation et de communication symbolique).
On ne peut exposer ici les mod�les cognitifs de compr�hension (Problem finding) et de conception (Design : Problem solving), au demeurant embo�t�s r�cursivement par lesquels on peut repr�senter l'activit� cognitive d�cisionnelle d'une organisation (Le Moigne, 1986c), (Simon, 1981). On doit en outre convenir du caract�re encore tr�s embryonnaire des sch�mas conceptuels dont on dispose pour rendre compte de son activit� proprement finalisatrice. Pendant longtemps, le processus t�l�ologique des organisations fut soit ignor�, soit ni� malgr� son �vidence sensible, et cette �contradiction �pist�mologique profonde� que diagnostiquait J. Monod �(1970) d�t �tre ignor�e parce que le paradigme �nerg�tique ne permettait pas d'en rendre compte.
On peut pr�sumer, ce sera une des conclusions op�rationnelles les plus s�res de cette premi�re tentative de mod�lisation inforg�tique de l'Entreprise-Organisation, que la conceptualisation instrumentale des �syst�mes de finalisation� va s'enrichir d�sormais progressivement : le renouvellement actuel des id�es sur le th�me du Pilotage (ou du Management) Strat�gique de l'Entreprise (Tabatoni et Jamiou, 1976), (Avenier, 1988) nous semble en constituer un t�moignage convaincant.
Ces dix propositions sont sans doute pr�sent�es de fa�on trop ostensiblement d�sincarn�e. Pour une part, le lecteur d�clarera qu'il pratiquait l'ing�nierie inforg�tique de son organisation � la fa�on de Monsieur Jourdain, sans le savoir. Et pour l'autre part, il s'irritera du changement de r�f�rentiel auquel ce Pattern constructif de mod�lisation le contraint, en lui d�conseillant syst�matiquement l'usage si familier de l'Analyse de l'Organisation et l?argument si s�duisant de l?optimisation �nerg�tique (�YAKA faire comme les abeilles construisant leur ruche dans la Nature par des cellules uniforme�). En outre, en substituant au clich� de la maximisation de l'Utilit� Esp�r�e, celui du processus complexe de finalisation, l'ing�nierie inforg�tique ne �simplifie� pas en apparence la t�che du mod�lisateur (et moins encore celle de l'enseignant charg� de transmettre ces mod�les algorithmiques)�; mais elle les incite � exercer leur intelligence et � pr�f�rer l?intelligible au simpliste.
Sans nier ces difficult�s socio culturelle inh�rentes � toute �mergence d'un nouveau paradigme, on peut l�gitimement appeler les praticiens � ne pas r�duire � une froide ing�nierie informatique le traitement des complexit�s que r�v�le chaque jour l?action effective des organisations sociales�: la m�ta-repr�sentation fonctionnelle de l'Entreprise-Organisation que permet l'ing�nierie inforg�tique, conduit � une grille de lecture, outil de diagnostic f�cond pour les acteurs de l'organisation et pour les concepteurs de son syst�me d'information.
Grille que l'on pr�sente sommairement par le tableau ci-apr�s : l'organisation s'entend par la double conjonction d'actions qu'elle agence en un �Complexe� (au sens d?un complexe chimique ou d?un vortex hydrodynamique)
:
par les rythmes inforg�tiques de ces actions enchev�trant le synchronique (l'Eco-Organisation), le diachronique (la R�-Organisation) et l'autonomisant (l'Auto-Organisation)
par les niveaux inforg�tiques de ces actions, selon qu'elles concernent les op�rations (physiques), les informations (symboliques) et les d�cisions (intelligentes)7.
L'architecture des fonctions qui s'agencent ainsi au sein de l'Organisation peut se d�crire inforg�tiquement � l'aide de cette matrice qui exprime la conjonction constitutive de son complexe d'action.
Avenier, M.J. Le Pilotage strat�gique de l'entreprise. Editions du CNRS, (1988)
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